Kontiendag 2023

Massif du Kugitan Turkménistan

du 6 au 23 mai 2023     Photos : un peu tout le monde

Jean Pierre, Jean Philippe, Véronique, Philippe A, Annie, Philippe C, Bernard, Josiane, Claire, Jean Marie

En 2019 nous en étions restés là : https://speleo-minervois.blogspot.com/2019/10/du-4-au-25-septembre-2019-jean-pierre-g.html 

Au bas de la falaise, coté Ouzbek. Et il avait fallu décamper précipitamment pour cause d'infiltrations de talibans sur la zone. Comme JPierre est très têtu, depuis 4 ans il a utilisé tous les moyens possibles pour passer sur le plateau lui même, coté Turkmène : ambassadeur, ministre... Le voyage, reporté de 6 mois en 6 mois paraissait impossible dans ce pays, un des plus fermés au monde. Mais cette année, miracle, l'autorisation est donnée. 

L'objectif est de repérer et de photographier les exceptionnelles grottes concrétionnées du sud du plateau mais aussi de parcourir les crêtes autour de 3000 mètres pour découvrir des entrées de réseau. Les grottes connues (et exploitées) depuis toujours ont été explorées par des équipes spéléo russes dans les années 1990, puis à peine parcourues. Tout au plus des témoignages de passage d'une équipe américaine et d'un petit groupe de spéléos suisses dont l'histoire mérite la lecture  : document ci-dessous à partir de la page 5

https://www.scpf.info/images/canard/canard14.pdf

Comme on voit dans cette article les topos existent. On a trouvé pas mal de points numérotés. Il y a même un report de surface. Certainement relevées par les russes. C'est pas vraiment le moment de leur demander.. On a fait avec 56 km de galeries sur une feuille A4...

Nous nous retrouvons à l'aéroport d'Istambul. Petit creux, je commande un hamburger : 26 euros. J'ai du tomber sur une fastfood de luxe. Je passe au suivant : 31 euros ! Ça commence bien, on devra se partager un bourrec...

Arrivée vers 3 heures du matin à Ashgabad. Avant de passer la douane tous les passagers doivent faire un PCR. Scène surréaliste : 300 personnes qui se bousculent pour se faire gratter le nez, pas bien profond heureusement, juste un effleurement de la narine, par une infirmière débordée. Même bousculade pour payer le test... 45 dollars, sauf pour Jean Philippe, Claire et moi : 31 dollars... Pourquoi ? Malgré les réclamations du reste de l'équipe il n'y aura pas d'explications. Puis c'est l'attente des résultats. Que l'on aura jamais. Il aurait été surprenant qu'un test soit positif dans ces conditions de prélèvement. Enfin, vers 6 heures un bus nous récupère pour acheter le visa et passer la douane. Les bureaux ne devaient ouvrir qu'à cette heure là...

Enfin dehors. Rosa, interprète de l'agence Owatan nous attend. D'origine Khazake, elle parle un français parfait. Sauf quand elle n'a pas envie de comprendre, ce que l'on verra plus tard.

Pourquoi une agence ? Il faut comprendre que faire de la spéléo ici est extraordinairement difficile. Non par la difficulté des cavités, mais par les complications administratives. Quatre niveaux de problèmes :

Le pays est un des plus fermés qui soient. Il est possible d'obtenir un visa de quelques jours pour voir un ou deux sites touristiques. Mais pour y rester 15 jours on a du obtenir une autorisation exceptionnelle du ministre lui même.

Le plateau du Kugitan est une réserve naturelle, interdite d'accès. La aussi : autorisation spéciale.

C'est une zone frontière avec l'Ouzbékistan mais aussi l'Afghanistan tout proche contrôlée par l'armée. Il faudra passer un check point tous les matins avec une attente de durée variable suivant les officiers.

Et enfin et ce n'a pas été le moindre : il faut passer par une agence touristique. Rosa, de bonne volonté, mais qui n'est jamais entrée dans une grotte, mettra un moment à comprendre qu'on est pas venu là pour faire du tourisme.

Bon, on y est. Le bus traverse la ville vers notre hôtel. 

Tout est neuf. Des immeubles blancs, en marbre... Des 2 x 3 voies qui sillonnent la ville. Tout est immaculé. Pas un papier ne traîne. 

Quelques rares voitures, blanches. Quelques bus, blancs (c'est la couleur préférée du Président) qui s'arrêtent sans déposer ni prendre de passagers. Pas un humain... Décor de science fiction d'une ville d'où l'humanité a disparu. On ne serait pas autrement surpris de croiser un extra terrestre visitant cette ville post humaine. Dans l'après midi nous croiserons quand même quelques habitants.

A l’hôtel on finit par décrocher une Wifi avec une excellente connexion, mais impossible de se connecter sur nos sites habituels (excepté gmail...). Pas de whatsapp, pas de mails. J'ai réussi à lire l'équipe...

Notre hôtel

Idem by night

ou si préférez...

Lundi 8 mai :

Passage à l'Institut Français qui dispose d'une Wifi libre, derniers messages et départ pour la gare. 18 heures de train pour rejoindre notre zone à l'autre extrémité du pays. 

Mary, traversée du désert du Karokum, Turkménabat, Kherki enfin ou nous arrivons au petit matin. 

Mardi 9 mai : 

Les 4x4 nous attendent pour 6 heures de route dans le désert. Après plusieurs checkpoints pour contrôle des passeports nous arrivons enfin à Koyten Genesligi au pied du massif du Kontiendag, la Montagne Infranchissable. 

Nous rangeons nos affaires et dès l'aprés midi : réunion avec les autorités. Shaniaz, spéléo, employé de la réserve sera notre guide pour le séjour. Coup de théâtre : le document qu'il a reçu de ministère ne nous donne pas droit à accéder aux grottes concrétionnées. Juste à une grotte "intermédiaire" ! Jean Pierre, habituellement calme commence à s’exciter. Il a passé une partie du voyage en train avec l'envoyé du ministère, Serdar,  pour vérifier les autorisations. Ce dernier a d'ailleurs disparu. Ça promet. On n'a pas le choix : demain ce sera la grotte intermédiaire, et les autres jours ?

Mercredi 10 mai : Kap Kutang 

TPST : 5 heures

Changement de programme. On a les autorisations pour toutes les cavités... aujourd'hui Kap Kutang. Une des plus belles, qui jonctionnée avec l'Intermédiaire totalise 56 km de développement. 

Contrôle au check-point. 

Piste cahoteuse et nous nous garons au bord d'un magnifique canyon. 

Nous descendons vers une entrée artificielle de la cavité. Elle a été exploitée depuis longtemps pour sa calcite rubanée, appelée ici "onyx", d'ou le perçage de tunnels d'accès pour faciliter l'extraction.

Et là, grand moment ! Le tunnel  (100 ? 200 ? mètres) donne accès à une salle plate et de bonnes dimensions. Le groupe se rassemble autour de Shaniaz. Rosa est là ainsi que nos chauffeurs pour qui c'est une première. Aucun ne porte de casque. Et nous nous dirigeons vers un éboulis assez pentu, traversé par un sentier en lacet. Shaniaz passe en tête et lance un avertissement. Rosa Traduit "Attention c'est un passage délicat" Derrière JPierre, agacé par ce début de paternalisme protecteur réplique "on est pas des touristes, on a l'habitude de la spéléo !" Il a à peine terminé sa phrase que Philippe C (ça a été lui mais ç'aurait pu être n'importe lequel d'entre nous) pose le pied sur un bloc de bonne taille qui à la mauvaise idée de se décrocher. Philippe, destabilisé, roule par dessus. Je suis 2 mètres derrière et j'ai vu la scène image par image dans un ralenti sans fin. Philippe et son rocher commencent à rouler dans la pente dans un corps à corps lascif qui se change rapidement en un rock and roll fougueux. Ils disparaissent derrière un ressaut pour s'arrêter quelques lacets plus bas sur le sentier. Le roc (estimé par la suite à 150 kg), lui, s'écrase sur le flanc de Philippe. Heureusement ! Sur la tête, même avec le casque c'en était fini. Bien entendu, tous ceux qui se trouvaient sur le passage ont été emportés. Un strike parfait. Des hurlements, des geignements s'élèvent de l'entassement des corps. Cela n'a duré qu'une fraction de seconde mais j'ai l'impression d'une éternité. Philippe pas C mais A, médecin s'occupe de Philippe (C) oui, c'est complique ces prénoms identiques. Je vais voir Rosa et Shaniaz.

Premier bilan :

Philippe est bien secoué, quelques hématomes un peu partout, une énorme contracture lombaire. Mais il est conscient, respire et tient debout après un début de malaise bien compréhensible. Après réhydratation et ressucrage il parait préférable qu'avec Annie il retourne aux voitures se reposer tant que les muscles sont chauds.

Shaniaz a un genou en vrac, mais rien de cassé et après quelques étirements il peut remarcher. Il boitera le reste de la journée et une bonne partie de notre séjour.

Rosa quand à elle a glissé sur la paroi. Quelques hématomes sur l'ensemble du corps mais surtout elle a laissé la totalité de l'épiderme de son avant bras sur un rocher. Son avant bras n'est plus qu'une plaie. Nettoyage et pansement de fortune elle poursuivra son initiation comme si de rien n'était.

Bref, plus de peur que de mal (à ce stade) et un bon début d'explo.

La cavité elle même n'a rien de terrible et on est assez déçus. 

Rosa, avec son avant bras bandé et Shanias

Shanias a du mal à retrouver les salles intéressantes. 

Extraction d'"Onyx", en réalité calcite rubannée

D'autant plus qu'il fait demi-tour à chaque fois qu'il faut se baisser. Lors de la pause repas, JPierre furète, passe une voûte abaissée et trouve une galerie plus décorée. Dans le labyrinthe qui suit Claire insiste et tombe sur notre première concrétion de gypse. Mais une poussière grise recouvre l'ensemble.

Shanias boite de plus en plus et nous décidons de rentrer plus tôt que prévu. Retour sur le plateau. Philippe ne va pas trop mal. Au camp Philippe A. a eu la bonne idée d'amener un appareil d'échographie et la compétence qui va avec. L'examen élimine tout saignement interne. 

Jeudi 11 mai : Géophysiskaya

TPST : 6 heures

Philippe ne se sent pas suffisamment remis pour nous accompagner. Il a laissé ses flashes à Annie qui va essayer de me former. Moi qui espérait 2 semaines de stage photo personnalisé ! Rosa reste également au camp.

Une piste très "limite", Un plateau désert et à nouveau un canyon tortueux. 

Vingt mètres de descente sur le flanc du canyon vers une trappe métallique. 

Derrière un passage en ramping de quelques mètres ; une descente entre 2 blocs et nous arrivons sur une grande salle poussiéreuse. Au bas, un éboulis et entre 2 gros blocs un passage descendant. Il aurait suffit d'un bloc de plus pour que tout soit bouché. Juste sous les blocs s'ouvre une salle magnifique. Pas une concrétion mais une galerie de 30 m sur 20 ; peut être 200 de long. Parois rouges et plafond  bien plat. 

La salle se termine sur un nouvel éboulis. Et donne accès à une nouvelle salle ovoïde. Mais là changement d'ambiance. On est dans un autre monde : du blanc partout, du sol au plafond. Des cristaux géants, des colonnes comme des sapins. On a d'ailleurs l'impression de marcher dans un décor enneigé. Au fond à droite la densité des concrétions échappe à toute description. Certainement la salle la plus spectaculaire après Lechugilla. Et Philippe qui n'est pas là ! Annie me guide sur le positionnement des flashes et nous ramenons quelques photos présentables.

Quelques photos ci dessous pour donner envie. Quelques unes à la fin de l'article et le reste dans le film que je sortirai dans quelques temps.

Sur le coté gauche, un puits (plutôt ressaut) de 6 mètres. J'installe une corde et nous descendons. 

Les Turkmènes refusent le baudrier et désescaladent les 3 premiers mètres puis...sautent ! Nouvelle enfilade de salles plus belles les unes que les autres et après la traversée d'une trémie désobstruée nous débouchons sur une galerie horizontale (10 mètre sur 5). 

Belles parois rouges ornées de toutes les formes de concrétions que l'on peut imaginer : choux fleurs, calcite, aragonite, inclusion de calcite (?) violette... 

Pour finir sur une forêt d'aiguilles de gypse !

Pour remonter nous évitons le puits par une escalade dans la trémie et ressortons gavés.

Le soir, Rosa nous entend parler de l'anniversaire de Claire. Aussitôt un des chauffeurs part au village et revient avec un magnifique gâteau à la crème (qu'on n'avait pas osé acheter quand l'après midi nous l'avions vu dans sa vitrine). Et bien entendu Vodka... 

Vendredi 12 mai.

TPST : 6 heures

Retour sur notre plateau. Même piste et nous partons sur la droite cette fois. Une doline au milieu de rien. Au fond une orifice avec une vieille grille métallique. La cavité a abrité un ermite dit la légende (il ne devait pas boire souvent) et a été exploitée comme carrière d"onyx".

Derrière l'ouverture : une salle immense : peut être 100 mètres de profondeur, encombrée de blocs.

Au fond un réseau de galeries presque aussi exceptionnel que celui de la veille mais dans un registre différent. Je m'aperçois que j'ai oublié mon déclencheur de flash. Ce qui me vaut un aller retour sur le plateau. Pour rien, je l'ai laissé au camp... Décidément, pour les photos c'est pas ça !

Des colonnes de gypse soutiennent le plafond grisâtre. 

Pas un puits mais une concrétion...

Des oeufs directement sortis du film "Alien". 

Des colonnes creuses, parfaitement régulières. Une d'elles atteint quelques mètres de profondeur et 2 mètres de diamètre "la prison". Merci aux spécialistes de donner une explication sur leur formation.

Philippe ne va pas mieux. Il a pu nous accompagner à pied au village boire une bière (500 mètres) mais avec pas mal de difficultés. Il faudra encore quelques jour de repos.

Samedi 13 mai.

Philippe ne va pas mieux. Il ne dort quasiment pas. Notre réserve d'antalgiques se tarit rapidement. Une évacuation sanitaire est déclenchée. Il n'y a pas d'urgence vitale mais il est clair que des examens doivent être réalisés et que la poursuite du séjour semble impossible. L'assurance de la fédé répond rapidement et un transfert sera réalisé dans les prochains jours.

Philippe et Annie restent donc au camp. Pour nous c'est journée "tourisme".

Nous remontons la vallée vers le nord en direction de l'Ouzbékistan tout proche. Nous longeons la rivière principale qui disparaît après un virage. J'ai bien envie de revenir voir d'ou elle sort.

Visite de la grotte des 40 vierges, avalées par la montagne pour échapper aux envahisseurs. Raison de plus de prospecter et de trouver de nouveau réseaux !

Le jeu est de "coller" une bande de tissus à une boulette de glaise et de la jeter au plafond pour qu'elle y adhère et ainsi permette la réalisation d'un voeux. Si ça retombe le vœux ne sera pas exaucé. J'ai bien failli me prendre la boulette jetée par JPhilippe dans la figure. Mais finalement elle est restée accrochée. Heureusement pour son vœux, et pour moi.

Un peu plus loin sur une immense dalle de calcaire : trace des éléphants de l'armée d'Alexandre le Grand lors de son escapade le long de l'Amou Daria.

Superbes paysages sur le désert et la vallée.

Dimanche 14 mai.

Aujourd'hui c'est "repos" ! Les chauffeurs et Rosa se reposent. C'est la première fois qu'on me fait ce coup là. Surtout pour une entreprise de tourisme...

Comme on avait tous envie de se dégourdir les jambes sans le chaperonnage turkmène ça tombe pas si mal. 

Philippe, pour lequel on a augmenté hier la dose et la nature des calmants retrouve de l'optimisme. Après une meilleure nuit, il envisage de repousser l'évacuation et de tenter d'aller à Géophysiskaya la semaine suivante. 

Il reste se reposer. Nous nous égayons dans différentes directions vers les canyons en face du village.

Claire et moi nous remontons la rivière vers la résurgence suspectée. Sept kilomètres à vol d'oiseau. La piste se faufile entre les maisons et les jardins. 

Au Turkménistan, quatrième réserve mondiale de gaz, les tuyaux jaunes sont partout. 

L'odeur souvent présente. Mais heureusement les fuites sont réparées.

  

Quelques chiens à éviter. Nous tombons sur une première résurgence (882 m). A coté, une petite cavité s'arrête après une dizaine de mètres. 

Le laminoir à moitié rempli d'une fine poussière est bien tentant. Il se dirige vers le massif. Mais il n'y a aucun courant d'air. Chez nous ce serait un chantier de rêve. 

Nous poursuivons la remontée.

Et arrivons à la résurgence principale (900 m). 

Un canyon débouche juste à coté. Nous le remontons mais nous sommes stoppés par un ressaut d'une dizaine de mètres. 

Sur la carte le canyon file vers le sommet à plus de 3100 m d'altitude...

Retour par la piste. Il est 14 h et il commence à faire chaud, très chaud. Un bus local passe, je l'arrête et nous montons. Tous les sièges sont pris mais les gamins se poussent immédiatement pour nous laisser des places. La conversation s'engage immédiatement : "Françous, Paris, Messi, Mbappé..." et s'arrête aussitôt, ce sont les seuls mots que nous avons en commun ! Claire aura plus de chance avec une gamine qui parle un peu anglais. Nous arrivons ainsi sur la place du village. Je cherche la monnaie pour payer le trajet. Prix affiché : 1 manat (10 centimes). Mais les voyageurs nous disent que pour nous ce sera un prix "spécial touriste" : gratuit ! Ces gens là n'ont vraiment aucun avenir. 

Nous retrouvons le reste de l'équipe au café principal ou ils sirotent des bières. Ils ont parcouru plusieurs canyons sans découvrir une seule entrée. Les sandwiches de Rosa sont loin et les pitas à la chèvre bienvenus. 

Pour une fois pas de sono à fond mais un "guitariste" local. Film de la danse endiablée qui a suivi dans la vidéo qui sortira prochainement...

Lundi 15 mai

Grotte Intermédiaire TPST 5 heures

L'effet des calmants passés, Philippe va de plus en plus mal. Dans la nuit il a perçu un craquement en essayant de se retourner. La douleur empire. Certes il n'y a pas d'urgence vitale mais l'évacuation ne fait plus de doute.

La douleur d'une contracture aurait du passer. Il doit avoir une fracture. Vertèbre ? Côte ? L'évacuation est décidée pour cet après midi vers Kerki avec un décollage demain vers Montpellier.

Nous partons vers la Grotte Intermédiaire. Même profil que Capcutang avec qui elle est reliée : plateau, canyon, entrée artificielle. 

Belles galeries, concrétions de gypse. mais après Géophysiskaya il en faudra beaucoup pour déclencher notre admiration.

Mardi 16 mai

Bernard et Josiane partent vers une grotte s'ouvrant au bas du massif dans une couche de gypse. 

Pour les autres : retour à Géophysiskaya, justement. TPST : 6 heures. 

Véronique, Philippe et JPhilippe poursuivent la topo. Un incident technique rendra les mesures inutilisables... Avec JPierre et Claire nous gagnons la forêt enneigée pour une séance photo. Avec les flashes que Philippe m'a prêtés et les conseils d'Annie. Pas évident de positionner les flashes dans ce milieu hyperfragile. 

Quelques échantillons à la fin de l'article ; il y en aura plus dans la vidéo qui sortira dans quelques temps. Juste de quoi donner encore plus envie à Philippe C. de revenir. Nous pensons bien à lui pendant cette séance.

Retour au carrefour ou nous attendent Shaniaz et les chauffeurs. En plus le directeur de l'agence de tourisme, venu spécialement d'Ashgabat les accompagne. Pas tout jeune, le souffle court et assez pataud il compte désescalader le puits. JPierre s'excite un peu "Il n'en est pas question ! Je ne veux pas qu'il nous suive" Je vais leur traduire en anglais mais ils n'ont pas grand chose à faire des recommandations de JP. 

"Qu'ils fassent ce qu'ils veulent mais je ne veux pas voir ça" et JPierre  grignote en leur tournant le dos. Bien entendu ils refusent le baudrier, et le temps que je range les flashes ils sont tous en bas.

Poursuite de la séance photo dans les aiguilles de gypse. Avec plus de lumière, du temps et du talent il y a de quoi publier un livre extraordinaire.

Mercredi 17 mai

Philippe est arrivé à Montpellier, après une évacuation qui s'est très bien passée. Merci la Fédé ! Il est aussitôt pris en charge au Centre Hospitalier. Bilan : 5 cotes cassées ! Plusieurs jours d'hospitalisation seront nécessaires pour retrouver une ventilation normale.

Il est prévu une journée de prospection dans les canyons, mais au petit déjeuner Rosa nous annonce : aujourd'hui : visite du marché !

Il faut quelques temps pour lui expliquer que nous ne sommes pas là pour le tourisme. que nous passerons faire quelques photos au marché mais que nous voulons partir vers le massif.. 

Nous irons effectivement dans un canyon, mais pour une balade plutôt touristique. Au retour nous repérons plusieurs entrées s'ouvrant à moitié falaise. D'accès plutôt difficile.

Demain nous devons monter en 4x4 vers le plateau d'altitude pour camper à 2200 m. A 2400 une entrée de grotte est mentionnée sur la carte. De là partent les canyons qui descendent presque sur 2000 m. Et nous ferons le sommet Ayribaba à 3139 mètres. Mais le temps se gâte et le vent se lève, à peine 17°. JPierre marmonne et n'est pas très motivé pour l'ascension.

Jeudi 18 mai

Le beau temps est revenu. Tout le matériel est chargé dans les voitures. Rosa et l'équipe de Owatan semblent enthousiastes à l'idée d'enrichir leur catalogue d'activité par un trek en montagne avec des français. Nous démarrons mais un appel de Shaniaz nous annonce que l'autorisation de monter sur le massif est annulée !!! On l'avait hier, mais il fallait rappeler le matin même. Et la décision a changé pour d'obscures raisons de zone militaire et de frontière... Nous ne saurons pas si des entrées s'ouvrent là haut, comme on en avait trouvé au dessus de Boy Bulok il y a 4 ans. Cette décision fait perdre une grande partie de l'intérêt d'une nouvelle expédition.

Du coup nous montons quand même sur le massif mais nous nous arrêtons vers 1200 mètres et commençons à remonter un nouveau canyon. Rapidement nous arrivons à des galerie de mine (plomb ?) creusées à l'époque soviétique. Sans grand succès apparemment. Ceci nous occupe la matinée et Josiane reste pour récolter des bestioles. Elle ressortira bien refroidie : à peine 10° dans la galerie. Le reste du groupe continue la remonté du canyon. Un pierrier plus raide que les autre arrête nos chauffeurs. 

Nous poursuivons derrière Shaniaz. Il nous amène à une petite galerie, presque en haut de la falaise. Enfin une grotte (plus 2 autres boyaux plus bas). 

Visite facile mais tout est bouché par la calcite et il n'y a aucun courant d'air. Cette cavité témoigne qu'il y a bien une karstification en altitude (on est autour de 1500 mètres). Au retour Shaniaz nous trouve un échappatoire par le haut de la falaise. 

Rapide descente vers les voitures sur un plateau désert en pente douce. Rien à voir avec la montée sur des haldes instables ! 

Vendredi 19 mai

Nouvelle prospection. Shanias nous amène au pied du massif. Un poljé se perd (quand il pleut) au bas d'une colline de gypse. Il y a bien une perte obstruée par des blocs et des branches. Un courant d'air glacé en sort. Mais il faudrait une bonne journée de désob, et de quoi creuser pour espérer tomber sur une galerie. Bernard n'est d'ailleurs pas très optimiste : "Dans le gypse, quand c'est grand au départ, ça rétrécit rapidement, alors quand c'est étroit dès le début..."

Nous poursuivons vers un canyon qui s'ouvre derrière la colline. Il est 11 heures, la température monte : 39°. Seuls, Jean Pierre, Jean Philippe, Véronique, Philippe et moi attaquons la rando. 

Seule ombre possible pour échapper à la fournaise

Belle balade d'ailleurs. Nous fouillons tous les orifices sur les parois. 

Mais rien qui ressemble à une entrée de galerie. Nous avons parcouru quelques kilomètres, il en reste une vingtaine ! Sur 2500 mètres de dénivelé !

La région est immense et nous n'arriverons à rien sans un repérage des entrées possibles par des locaux

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Samedi 20 mai Dimanche 21 mai

Trajet retour sans incident particulier

Conclusion (temporaire)

Expédition extraordinaire à plusieurs titres. De par les difficultés pour entrer dans le pays déjà. Pour parcourir la zone ensuite.

Extraordinaire également de par la richesse des concrétions. Impression de parcourir un paysage enneigé en étant même surpris que cette "neige" n'était pas froide et que nos pieds ne s'enfonçaient pas en la parcourant. On est même passé vite devant des bouquets d'aragonite qui ici nous auraient émerveillés, tellement il y avait de quoi voir autour.

Paysages magnifiques également dehors. Massif calcaire nous dominant de 2500 mètres parcouru par des dizaines de canyons remontant jusqu'au plateau sommital. En face : des collines sédimentaires alternant des couches vertes et roses. Entre les deux une vallée oasis parcourue par la rivière issue de la résurgence.

Extraordinaire également par l'accueil de la population. Sevrée de contact avec des occidentaux depuis les années 90, et avant ils ne connaissaient de l'occident que les russes. Partout des sourires (à part les gamins qui étaient plutôt apeurés), des invitations à parler, danser, échanger des photos et surtout partager la vodka ! Ici la rigueur d'Ashgabat ne se faisait pas sentir. Tous les enfants sont scolarisés, garçons et filles. 

Pour l'école : costume, chemise blanche, cravate pour les garçons ; robe verte et tresses pour les filles

Pas de voiles sur les visages, sauf quelques vieilles montagnardes. Des femmes, de tout âge qui vont ensemble siroter une bière en discutant et chantant avec la sono à fond du bar local. Et qui s'adressent librement à nous pour partager des selfies. Rien à voir avec les voisins du sud...

Mais par ailleurs, une frustration immense de ne pas avoir pu prospecter dans la zone surveillée autour des grottes concrétionnées. Et sur le massif. Impression d'inachevé également du fait de l'accident de Philippe qui nous prive de photos exceptionnelles. Certes on ne pouvait pas faire mieux. Nous venions ici, avec quelques documents trouvés sur internet et ne savions rien, ni de la géographie exacte des lieux ni des règles administratives. Une nouvelle expé est en prévision pour le versant photo d'abord : Philippe est sorti dimanche de l'hôpital fermement décider à en découdre avec ces cavités. Et également pour découvrir de nouveaux réseaux. Mais elle n'aura un intérêt que si on est certains de pouvoir parcourir la zone sans contrainte horaire... A suivre

Comme promis : Géophysiskaya :

Rorschach turkmène